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Chocolat Chaud

6 décembre 2011

La Leçon d'Espagnol

 

profesor

 

Il fait chaud...on s'ennuie, Marie déclare.

-Mamie Adèle dit qu'il ne faut jamais rester inactif.

-Dessinons, chantons, dansons.

Cariño bâille, avez-vous déjà vu bâiller un basset? C'est à aboyer de rire. Moi, Chocolat, labrador chien de président, je détourne mon museau pour masquer un sourire gênant.

Doucement, Cariño sort de sa torpeur.

-Je vais vous apprendre l'espagnol.

-oui, crie Marie toute excitée.

-Jouons à l'éccole, je vais chercher mes poupées.

Nous voilà installés sur la terrasse en rang d'oignon, le basset en première ligne.

-Je suis votre professeur, profesor, les noms en eur font or, televisor, radiator, ascensor.

-Je me présente Cariño pour vous instruire, en français chéri pour vous servir.

-Il est facile de parler espagnol, on arrondit la bouche en o pour le masculin, on élargit la bouche en a pour le féminin, adulto, vino, centro, visita, barba, barra et ainsi de suite.

Marie attentive dit: facile, donc facilita. Cariño, de sourire.

-Bonne remarque mais il faut savoir que tous les mots en té  font dad, facilité, facilidad, probabilité, probabilidad.

Attention aux faux amis.

-Je dis sol, ne regardez pas en bas, regardez en haut, c'est le soleil.

-Mais encore gato n'est pas une pâtisserie: gato c'est le chat, je m'esclafe.

-un chat n'est pas un gâteau, quand je pense à coquin, le chat d'Adèle.

Marie glousse à la plaisanterie.

Les poupées restent muettes et sans réaction. 

Ciel, commes elles sont bêtes!!

Comment Marie peut-elle leur accorder tant de considération.

Mystère et boule de gomme.

Cariño continue.

Abordons la prononciation.

-Il faut articuler toutes les lettres, voyelles, consonnes, faisan se dit faisane, camion, camione, avion, avione, balcon, balcone.

-allez, après moi, faites chanter votre nez, cinturone, pantalone, salone et j'enchaîne coquin, coquine, coquine, coquine, à tout ce chahut Adèle accourt, suivie de coquin.

Quel charirari. Que se passe -t-il questionne Adèle

Avec pleins de mimiques, Marie explique que nous jouons à l'école et nous savons parler l'espagnol.

-Parfait, rétorque Adèle. et bien maintenant je vous déclare en vacances.

Calmement, elle s'en retourme, Coquin sur ses talons.

 

 

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23 septembre 2011

La Transparence

Laurent, c'est le défunt mari de Mireille, parti sur un mauvais coup de coeur. Il erre dans la maison, relégué au pays des souvenirs. Il est bien là, dans le monde de la transparence, période de l'après vie qui fait suite aux différents étapes, le nourrisson, l'enfant, l'adolescent, l'adulte. Le passage du chérubin à l'enfant s'effecctue plus aisément que celui de l'adulte à la transparence. Cependant quel fabuleux bébé était Marie! Adieu babillages, risettes.

Laurent et moi discutons souvent ensemble. Des drôleries de l'existence.

Rendez-vous à la treizième heure du jour, nous nous retrouvons, lui dans son fauteuil favori, moi, aux pieds. C'est l'heure du coup de feu en cuisine, nous sommes tranquilles et il peut me confier ses désillusions.

Laurent- J'ai beaucoup de pouvoir mais je reste impuissant devant la passivité de Mireille.

Chocolat   - Elle ne te voit pas?

Laurent- Comment le pourrait-elle, ses yeux sont brouillés de pleurs.

Chocolat   - Mets un drap sur ta tête, c'est la mode en Écosse.

Laurent- Mascarade. J'ai peut être une idée!

Chocolat   - Je suis tout ouïe.

Laurent- Brave chien, dynamite le mur qui la retient prisonnière, fait à chaux et à ciment de larmes.

Chocolat   - D'accord, je suis prêt à exploser cette cloison de mélancolie qui vous sépare à tous deux, mais, comment?

Laurent- La peine l'enserre inexorablement, l'isole totalement, la tâche est difficile. Seul un artiste comme toi peut réussir. 

Chocolat   - À tes ordres.

Laurent- Je te sais être un comédien fabuleux. Fais-la rire, change-lui les idées.

Chocolat   - Je suis partant.

Divertir les humains n'est pas facile. Je reste songeur, pas question de raconter une blague d'Olive et Marius, dès que j'ouvre la gueule, elle me fait taire.

Il faut monter de toutes les pièces un tableau cocasse, du Charlot, un comique de gestes désopilant qui aide à pouffer.

Je crois maîtriser la situation, il faut battre le fer quand il est chaud.

À la vingt-et-unième heure de la journée, je suis prêt à agir, fébrile et déterminé. C'est parti pour le cirque.

Au milieu du cercle de famille, je glisse volontairement sur le sol ciré, je fais mine de me prendre les pattes dans les franges du tapis, et, j'atteris intempestivement le museau, dans les glaïeuls du pot de fleur décoratif, posté devant la fenêtre, la mine déconfite. Tour de farce réussi.

Fou rire général.

Le rire a dit Rabelais, est le propre de l'homme. Marie est rouge d'un bonheur honteux. En règle générale, les chutes d'autri sèment la gaieté. Mireille éprouve une satisfaction inavouée qu'elle cherche à dissimuler, sourit, et, s'esclaffe à son tour.

C'est gagné, le mur de séparation s'effondre dans un éboulis de tourments.

Laurent, rapide, tel un flash, agit vite, diffuse sur les ondes une chanson composée par Brassens, interprétée par Marcel Amont, désuète, seulement connue de tous les deux et lourde de messages. "Le chapeau de Mireille". Touché. Les deux coeurs sont réunis. Laurent murmure à l'âme de Mireille.

Mireille perçoit par l'intelligence. Elle sait qu'il est bien, qu'il est beau.

                                                                                          3 (1)

15 septembre 2011

Les Oreilettes

  C'est doux au coeur d'avoir deux grand-mères, Adèle dans sa tour n'a pas entendu les cris de détresse de Marie, mais, Mireille répond, présente. Marie est réconfortée et presque heureuse d'avoir eu peur pour être maintenant consolée tout en charme et tendresse.

"Viens Marinette, nous allons faire de la pâtisserie." Le cérémonial du à l'évènement solennel commence. 

Marie enfile un tablier de cuisine qui lui  arrive aux pieds, Mireille sort, religieusement, d'un haut tiroir le précieux livre de recettes. En chien fidèle, je me tiens impertubable auprès de ma maîtresse, tel un Suisse responsable.

Grand-maman a une bonne pratique du manuscrit, elle le connaît pas coeur et quelquefois improvise avec bonheur. Elle ne néglige pas l'intérêt et l'attachement que porte Marie à ce cahier, superbe réunissant toutes les lettres de l'alphabert dessinées en relief avec les pleins et les déliés, décoré d'ornements floraux multicolores.

Marie tourne délicatement les pages et choisit ses gâteaux préférés: les oreillettes ou merveilles  ou bugnes, appellations diverses selon les provinces françaises. Cariño dit que ces gourmandises sont d'Italie. Je le soupçonne d'un tantinet de chauvinisme, il a des origines italiennes, sans importance, ces friandises dont délicieuses et belles à croquer.

 

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Les Oreillettes

Ce sont de petits gâteaux à la poëlle très économiques et très faciles à faire. Avec les portions suivantes, vous en obtiendrez une grande quantité. 

Pétrissez tout ensemble 250 grammes de farine, 2 oeufs entiers, une cuillerée de sucre en poudre, une pincée de sel, gros comme un oeuf de beurre, une cuillère à soupe de cognac: vous devez obtenir une pâte assez dense  et moelleuse au toucher. Etendez-la au rouleau. Coupez-la en rectangles de dix centimètres sur deux environ, faites des noeuds, jetez-les à pleine friture, laissez dorer, égouttez sur papier absorbant, poudrez-les de sucre et dégustez-les chaudes, tièdes, froides.

                                                                          gif cuisine

La cuisine s'embrase d'ardeur, chacun a le coeur à l'ouvrage. Marie s'active, scrupuleusement, armée d'une cuillère à pot, elle saupoudre avec ampleur d'un geste large, les gâteaux, et, par la même occasion, arrose de poudre blanche, les tomettes rouges du sol.

J'entre en scène, tout doit disparaître, à moi de faire le nécessaire. Je ne suis pas en reste, à grands coups de langue, je nettoie l'office.

Les oreillettes sont prêtes, régalons-nous, annonce Mireille.

Laurent les aimait tant.

6 septembre 2011

Image

Marie avance délicieusement dans l'eau bleue avec des mouvements réguliers, un peu sur le côté. Elle ondule avec grâce, telle une sirène. Elle nage, elle sait nager la brasse indienne, brusquement elle ressent des petits picotements douloureux, aux bras, aux pieds, partout. Misère, ce sont des piranhas, des poissons du fleuve amazone a dit Arthur. Que font-ils là? L'eau n'est pas douce, Marie a les yeux qui piquent. Ils sont en mission secrète. C'est une légion spéciale, chargée de la captiver parce qu'elle est entrée en conflit avec les poux-vampires. Les représailles de la guerre s'annoncent.

Marie tape des pieds plus fort, souffle, veut crier. Les mots ne résonnent pas et se transforment en une suite de bulles qui voguent alentour commes des notes de musique échappées à la garde de la clé de sol. Elle ne voit plus rien, le bleu a viré au noir, noir intense comme lorsqu'elle a renversé l'encrier d'Adèle.

Elle est alors engloutie, absorbée en spirale, des mains collantes ont saisi ses pieds et l'entraînent inexorablement vers le fond à une vitesse prodigieuse. Elle tombe et ne semble jamais choir.

Miraculeusement ses pieds touchent le sol, l'air est respirable, le noir s'est estompé, tout est lumineux et scintille de milles feux. Des pierreries brillent dans tous les coins et recoins. Elle n'a plus peur, tout est beau et vert et rouge, c'est noël! Elle est libre et entière. Oú est-elle? Dans une caverne merveilleuse semblable à la grotte des demoiselles sur la route de Ganges, pas en noir et blanc mais en couleur.

Surprise par tant d'éclats, elle plisse les yeux, elle n'est pas seule, des petites personnes se pressent autour d'elle. Elles ont la tête ronde complètement dépouillée de cheveux, elles actionnent nerveusement deux paires de bras et quatres jambes. En musique, elles se présentent: Hune, princesse des mers, héritière de Poseidon, et ses soeurs deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, la plus petite neuf. Elles s'agitent, trépignent, se mélangent, la leçon de calcul commence. Deux avec cinq amènent sept, trois avec quatre, encore sept, Hune avec la grosse six toujours sept. Sept a gagné, elle est à l'apogée du bonheur et rit en cascade de bulles. Elles applaudissent et effectuent une danse de claquettes.

C'est à ce moment précis que Marie réalise, elle est en présence de pieuvres.pieuvre-gif-009 Elles aperçoit sous leurs bras et jambes, les ventouses. Le nuage noir du début était audacieux, lâché pour lui sauver la vie et la préserver des poissons grignoteurs. Heureuse, Marie danse avec ses nouvelles amies, dans des grands rires de bulles. Elle saute joyeusement pour crever les globules d'air.

Une bulle éclate, geste malheureux, les pieuvres sont paralysées sur place et transformées en rocher . La bulle crevée laisse éclore un monstre marin dans un bruit assourdissant d'obus.

Ma petite maîtresse est en danger, apeurée, elle se sauve , glisse sur les algues vertes, se réveille, lance un appel au secours. "Adèle, Mireille"

24 août 2011

Riposte

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Adèle est la maman de Suzelle. Elle occupe l'appartement du dernier étage, plus on est riche, plus on habite haut. Toute la famille vit dans le même immeuble. Suzelle et Arthur sont des amis d'enfance. Ils resteront amis pour toujours. Ils ne savent pas gérer une vie de couple. Je leur suis reconnaissant d'avoir conçu Marie.

Je ne l'accompagne pas chez Adèle. Il y a un chat, un gros matou aussi large qu'un coussin posé sur le sofa à côté de sa maîtresse installée confortablement dans son fauteuil dont elle a pris la forme. 

Elle déguste à longueur de jour des douceurs, des macaron roses et verts, des calissons, lit et écrit des romans d'amour. C'est une romancière branchée. 

"Je suis contente de te recevoir Marie, prends un bonbon."

Au problème soumis, elle répond par un cours de géographie: "L'Argentine est à 12000 kilomètres, tranquillise-toi par précaution, natte tes cheveux."

Elle promet quand même d'établir une chaîne contre les malfaisants. Elle écrira à cinq de ses amis qui à leur tour écriront chacun à cinq autres correspondants et ainsi inondent le monde de papier. C'est un bon début, Marie est satisfaite.

Le basset nous annonce la contre offensive de son pays. L'Argentine réagit. Les chauffeurs de taxi suspendent un crucifix à leur rétroviseur pour conjurer le sort et éloigner les mauvais esprits. Les parents alarmés, ne sont pas en reste. Ils ont recours à des entreprises qui viennent à domicile, des équipes armées d'un matériel sophistiqué, brosses en tout genre, des peignes diversifiés jusqu'au peigne électrique. Les poux sont électrocutés sur place dans des positions fantomatiques. Également sont organisées des séances de lumières noires, les affreuses bestioles deviennent phosphorescentes et un coup de vent les attire inexorablement dans le ventre d'un gros aspirateur. Marie sourit.

Le monde entier se mobilise. Les gens de la mode organisent des défilés de mannequins, le cou garni de colliers de fleurs d'ail qui indispose les imposteurs. La solidarité entre en jeu. La bonne ville de Marseille donne sa recette de l'aïoli. Il faut s'enduire la tête de mayonnaise et porter un bonnet de bain. Le poux suffoque. Marie rit. 

Les salons de beauté proposent des frictions à l'huile de coco. On assiste à la chute vertigineuse de grandes maisons spécialisées dans le shampoing à la fraise, la population maléfique en raffole. A bas la fraise pour laisser la place aux senteurs de lavande. La provence envoie la plante par balles. Les fagotins de lavande inondent de bleu Buenos Aires. La petite fleur agit en profondeur, c'est l'extermination totale. 

Demeurons toutefois attentifs et méfiants à l'égard de la sournoise lente qui peut ressusciter.

Soulagé, je me retourne vers Marie. Elle s'est assoupie, la tête doucement inclinée sur l'épaule.

Nom d'un chien, qu'elle est jolie quand elle dort. Elle est partie au pays des rêves, après toutes ces émotions, dans les bras de Morphée.

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17 août 2011

Les Vampires

Cariño, le basset3, est le compagnon d' Eduardo, l'ami argentin d'Arthur. Il se tient au courant de tout. Il est une source de savoir. C'est un érudit, la gazette de l'Amérique du Sud. Il paraît soucieux dans le temps présent.

Une menace pèse sur son pays, peut être sur le monde entier. Il a l'oeil morne, une triste gueule qui nous alarme. Il propose un colloque. La situation est grave voire inquiétante.

Pourrons-nous suspendre le cours du temps. Marie blême, écoute, un crayon à la main, ne dit rien, griffonne une suite noire d'hieroglyphes.

Ses petits doigts magiques sauveront-ils la planête? Comme pour répondre, la bouche de Marie s'arrondit mais la  petite sorcière reste muette, fait voyager son crayon, du papier à ses lèvres, à sa chevelure.

Brusquement, elle est prise de frissons. Je la comprend, elle est en première ligne. Je me serre contre elle, gueule bée.

Alerte à Buenos Aires, un essaim de bêtes malfaisantes a envahi la capitale. Les vampires sont en Argentine. Ils sont là, sournois, cachés. Quel vent maléfique les a poussés à venir dans cette vaste ville où tout est beau, où tout est grand. L'avenue du 9 juillet est la plus large du monde. Les promenades dans les parcs plantés de palmiers et de sycomores flattent le nez. Il y a plus de soleil, plus de ciel, plus de sourires. Le plus cache le moins, en occurence ces êtres infâmes infiniment petits, velus aux pattes crochues. Les poux sont des vampires. Ils ont élu domicile dans les chevelures soyeuses des petites filles argentines. Leur épais cheveux sont une cachette idéale. Dans l'ombre des boucles, les bêtes vivent grassement. Elles enduisent le crâne  d'un revêtement excrémentiel qui envoûte les fillettes qui les logent gracieusement. Sous l'effet de cette domination supérieure, les "jeunettes" trompées les affectionnent particulièremnt, les nourrissent de leur sang dont les poux se gorgent goulumment, flattés par de rapides et fréquentes petites frictions, quelques filles se vantent de posséder de véritables collections. Elles s'échangent les plus beaux spécimens dans des accolades argentines. Elles se reconnaissent entre elles par des mouvements vifs de la main au niveau de la nuque.

Imprudentes, elles ignorent jouer le jeu de ces dangereuses créatures, bêtes à diable, qui font des petits et prolifèrent rapidement. Toute l'importance est aux femelles, c'est une histoire de filles. L'épouse, aussi laide que son mari qui peut avoir plusieurs femmes, vit trente jours et pond dix oeufs par jour au total 300 oeufs.

J'ai appris la multiplication avec ma petite maîtresse. Je pose le chiffre et je compte les zéros. Demain, les poux reprendront leur forme initiale et possèderont le monopole du sang humain. Un futur sombre se profile.

J'aboie à haute et intelligible voix: "Marie est lá."

La première frayeur passée , calmement elle reprend les directives. Ses yeux, couleur des eaux du canal du midi, jettent des étincelles avec détermination, elle déclare "nous lutterons, nous vaincrons." Elle lance un cri de guerre: "Pou Ah!"

Elle enchaîne "au programme, je prévoie le conseil des anciens, j'irai voir Adèle."

 

 

10 août 2011

Petite Sorcière Bien Aimée

            bruji    Qui est Marie? C'est une fillette toute en grâce, régulièrement jolie, aussi douce qu'une briochette. Elle est la fille d'Arthur et Suzelle, couple divorcé, Suzelle en a la garde, Arthur le droit de visite.

 

Marie est sur la sellette aujourd'hui, qui s'occupera d'elle? Immédiatement, je me mets en avant: petits sourires aux coins des lèvres de la famille. J'obtiens gain de cause, la petite restera avec moi chez la grand-mère.

Marie ne va pas à l'école pour une banale histoire histoire de vocabulaire. Je vous raconte. Le premier jour de classe, non pas la maîtresse, non pas l'institutrice, mais mademoiselle pipi saisit Marie par l'épaule, lui dérobe le biscuit qui était confiné dans sa menotte: "Déjeune chez toi, à l'école on mange seulement à dix heures" et d'une voix sans réplique  ajoute "vas poser ton sac sur l'étagère." Panique, affolement, crise de larmes. Marie ne sait pas ce que c'est "l'étagère". Elle ne retournera pas à l'école, elle ira dit-on à l'âge de raison.

Marie est très intelligente, c'est la seule avec qui je converse. Tous les chiens parlent, ce n'est pas un secret. Regardez les films-télé. `

Ensemble nous avons fait des recherches, une étagère, c'est une ou plusieurs tablettes, c'est tout. Chez nous, il n'y a pas d'étagères. Elles sont toutes enfermées dans les armoires.

Marie et moi somme complices. Quel est le programme du jour? Pas le jeu stupide, "je jette la balle, tu la rapportes." Mais des tours d'adresse surnaturels.

Marie est une petite "sorcière bien aimée". Elle agit avec finesse et avec concentration. Elle est très forte et sans froncer le nez, uniquement avec ses petits doigts magiques, elle déplace les choses. Elle vient de repérer tout en  haut du placard à provisions des friandises. Les bras tendus, elle s'élève sur la pointe des pieds comme pour danser, attention grand maman arrive, Marie improvise une suite de petits pas en cadence, l'attente passée, toujours les bras levés, elle durcit à l'extrème ses muscles, les petits doigts raidis agissent et sans formule magique, tout dégringole, bonbons,céréales, chocolat à même le sol, 184 la panoplie du parfait gourmand. J'avale tant de chocolat que je crois être marron. Je passe devant le miroir. Il n'en est rien, seulement quelques traces vite effacées par la séance piscine qui s'enchaîne, rapide Marie n'est jamais prise de court, les idées foisonnent, les petits doigts magiques agissent, la chambre attenant à la salle d'eau se transforme en bassin. Nous gesticulons, faisant des vaguelettes et toutes les marques de chocolat disparaissent. Comment se sécher, vite, Marie a une idée folle. Elle couvre la chambre de flocons de neige tout droit sortis du matelas, elle branche le ventilateur et il s'en suit une danse effrénée de sioux qui alerte la grand-mère pas contente, on ne sait pas pourquoi, question de génération. Résultat: un pensum.

Dans le bureau, Marie doit faire un dessin. Laissant les feuilles de papier, Marie exprime son talent sur le mur. Armée de bâtons de couleur, elle trace allègrement, concentrée, sa petite langue pincée entre les dents un croquis saisissant de vérité: elle et moi gigantesques, en perspective l'aïeule, en patte de mouche Arthur et Suzelle. A la vue du tableau, la grand-mère reste saisie d'admiration, paralysée, privée de tout mouvement. Enfin, elle retrouve ses facultés, s'empare du combiné du téléphone, compose un numéro  et hoquetant demande l'inscription de Marie aux beaux arts dans une Galerie.

Cariño pense qu'il s'agit d'une garderie.

3 août 2011

Joyeux Anniversaire

perritoJ'ai choisi son cadeau d'anniversaire. Je me délecte à l'avance. Je pense à son plaisir. Je voudrais le suspendre, l'étonner, le ravir. Je veux lui envoyer tout mon amour en pleine figure, qu'il y soit les pieds dedans. Ce sera notre façon de communiquer puisque les mots ne peuvent nous unir. Il posera sa main sur mon cou, mon dos. Je passe et repasse ma langue  par anticipation sur mes babines. Je salive. J'aurai l'art de tout combiner en vue de la réussite de la stratégie pure, vous-dis je. C'est une opération délicate qui demandera beaucoup de réflexion et d'ajustage : d'abord le choix de la laisse, souple, élastique, coïncidant avec les mouvements de reins appropriés et subtiles. Peut être devrais-je m'assouplir. Je dispose de trois jours, trop tard pour trouver une autre idée de cadeau. Mon dieu qu'il va être heureux. Il en restera tout ébahi. L'heureux anniversaire tombe un dimanche, parfait, c'est le jour de notre promenade dominicale. Nous serons seuls en parfaite communion, lui , moi et un parfum suave que je divulguerai. Que je l'aime. Il lira dans mes pensées. Il paraît que c'est le cas quand on boit à la même coupe. Là, c'est plus que boire.

Mon maître, je te prépare la plus moelleuse des surprises. La joie te montera des pieds à la tête et passera par ton coeur et par ta bouche sortira l'exaltation: "Ah! Mon Chien, j'exulte." Son chien, c'est moi. J'ai cinq ans, ma venue au monde coïncide avec l'année du C. Les chiens sont tenus de respecter l'alphabet. J'aurais pu me prénommer "Chien" ou plus élaboré "Cyon", non c'est Chocolat, vous allez croire que j'ai un pelage marron. Je suis un labrador sable et Arthur, mon maître de répartir: "alors, n'y a t-il pas de chocolat blanc." Il a beaucoup d'humour, c'est pour cela que je cherche un cadeau d'anniversaire à sa hauteur, les pieds dans la merde. C'est écrit, ça porte bonheur. Vous voyez la délicate entreprise: l'amener à marcher dedans. Chaque fois que je satisfais mes besoins, il reste à quelques pas distrait, le nez en l'air en état de frustration. Nous repartons mélancoliques de laisser une oeuvre d'art. Je ne veux pas me flatter mais je suis un artiste méconnu. Je vais me surpasser tant en qualité que quantité.

Trois jours, je vais me retenir pour pouvoir mettre le paquet et choisir mes aliments pour l'odeur, les boulettes au poisson, j'adore. Il faut une émanation forte et enivrante. Oh mon bon maître, jusqu'où peut aller l'amour. Deux jours, je sors comme à l'accoutumé mais je me contente d'asperger les murs. Je suis tellement occupé par la stratégie de l'opération que je supporte allègrement les douleurs d'abdomen, ça turbine. Je prévois une parfaite réussite, un modelage sublime. En jetant un regard en arrière, il m'est souvent arrivé de dégager de véritables sculptures et de ressentir une grande tristesse de laisser mon patrimoine à la merci de la semelle d'un quidam. Demain, mon maître aura l'avantage exclusif, le plus bel anniversaire de sa vie.

Jour J, c'est la neuvième heure de la journée. Je choisis ma laisse, c'est toujours à moi qu'il incombe ce choix. Ma préférence va à une laisse argentine. Elle est rouge, couleur de l'amour, élastique, elle ramène le chien à son maître, avec de la dextérité la réciproque est vraie. Nous partons fringants. Il est en jogging et baskets, je suis déçu, il aurait pu faire un effort vestimentaire. Il ne sait pas ce qui l'attend. Je serais le premier à lui souhaiter son anniversaire surprise. Nous arrivons à l'abord du petit jardin. Je me mets en frais, comme d'habitude il se tient à l'écart. Je force, c'est dur  après trois jours d'abstinence. Un pet foireux pour faciliter le passage et je réussis avec soulagement un modèle parfait tout en hauteur. Je suis satisfait maintenant attention la partie technique se profile. Je me rapproche au maximum de lui, il parait tellement surpris et je détale rapidement l'entraînant avec moi, un seul faux mouvement et tout rate. Je file sur la cible et d'un coup de rein majestueux, je me dérobe laissant l'approche  à Arthur qui arrive effaré sur l'etron, à l'écart, fier et modeste, quand même je jubile, j'aboie "Bon Anniversaire" et lui les pieds dedans de débiter des remerciements incongrus, des appels au ciel, des incantations. Il est magnifique, on dirait le muezzin du haut du minaret. Je n'ai pas eu les caresses rêvées qu'à cela ne tienne. Je connais Arthur, incapable de manifestations extérieures, totalement distant, c'est celui qui rentre chez lui en marche arrière pour pouvoir vite repartir. Tous ses amis l'ont complimenté et traité d'homme heureux. d'hommes chanceux et dans la joie géniale lui ont conseillé de jouer au loto.                   

 La suite m'approuve  depuis Arthur sort en promenade avec un sachet dans lequel il introduit le reliquat de ma digestion qu'il dépose dans une boîte aux crottes pour un éventuel concours, je crois. Au récit Marie a applaudi et pour lors elle m'appelle Caca.

 

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